Diplômé de : Télécom Physique Strasbourg (anciennement ENSPS)
Promotion : 1989
Spécialité : Applications Biologiques et Médicales
Rôle actuel : Policy Officer
As-tu passé un autre diplôme ? Si oui, lequel ? Quels en ont été les bénéfices?
DEA Mécanique & Acoustique + Doctorat Génie Biologique et Médical
Décris ton parcours depuis la sortie de l’école
J’ai d’abord fait une thèse. Ayant obliqué vers le secteur médical en choisissant l’option Applications Biologiques et Médicales, j’avais le sentiment de n’avoir qu’un vernis dans ce domaine et je souhaitais être un peu plus compétent en arrivant sur le marché du travail. Sans doute l’angoisse qui saisit beaucoup de jeunes ingénieurs tout juste diplômés : «quelqu’un va bien finir par s’apercevoir que je ne sais pas grand chose… ». Il y avait donc le souhait de reculer l’échéance.
Ayant fait un DEA en même temps que ma 3ème année, j’étais partant pour une thèse. D’autant que la recherche m’intéressait plus, à priori, que toute autre activité.
D’autre part, ayant identifié un domaine qui m’intéressait particulièrement (l’imagerie médicale par résonance magnétique, deux de mes stages ENSPS portaient sur ce thème), je savais avoir -après mon service militaire que j’allais aussi effectuer dans le même secteur- une offre de faire une thèse chez l’un des leaders mondiaux dans cette branche, chez Siemens, à Erlangen dans le nord de la Bavière. Cela renforçait les perspectives de décrocher un emploi ensuite dans cette même entreprise. En tout état de cause, ça ne ferait pas de mal à mon CV.
Pour la thèse, Il y avait à l’époque de bonnes relations entre Siemens et l’Ecole, maintenues par le Directeur des stages d’alors (Bernd Kaempf), qui dirigeait également l’option ABM. Tous les ans, il parvenait à placer quelques stagiaires à Erlangen ou à Munich. Pour moi, le fait d’avoir déjà effectué deux stages dans le secteur (à l’institut de Physique Biologique de Strasbourg, chez le Prof. Chambron, et aux National Institutes of Health, à Bethesda, Maryland, près de Washington) a facilité les choses. C’était une thèse de l’ULP en Génie Biologique et Médical. Effectuée dans un laboratoire de la Division Centrale de Recherche de Siemens à Erlangen, avec une bourse de Siemens. J’ai eu 37 mois de bourses : la durée normale de la thèse plus une extension de 1 mois pour traduire en anglais une version abrégée. Mon Directeur de Thèse était un professeur de l’ENSPS, M. Stoll, spécialiste en télédétection. A l’exception du fait que mes travaux portaient sur des antennes, le sujet de mon doctorat sortait complètement de son champ d’expertise, mais c’était sans grande importance tant que la compétence pour m’encadrer était présente sur place dans mon labo.
Comme beaucoup de thèses. Rien ne marche pendant deux ans, on désespère. Tout s’accélère ensuite. On s’en sort à la fin. J’avais 8 ans d’allemand un peu rouillé derrière moi, mais le plus dur était d’exprimer des idées un peu complexes ou philosophiques dans la vie de tous les jours. Le fait d’être limité par la langue dès que ça se compliquait me donnait l’impression de passer pour un crétin auprès de certains. Pour le côté technique, l’anglais fonctionnait. L’ambiance était bonne au laboratoire. J’étais très bien accepté. Cette expérience m’a permis de constater qu’il y avait des types infiniment plus brillants, doués et astucieux que moi, pas tous, sans doute, mais assez pour que je m’interroge sur la valeur ajoutée que je pouvais apporter en tant que chercheur.
Je crois que l’enseignement académique m’a été modérément utile. En revanche l’expérience passée des stages s’est avérée beaucoup plus importante.
Au final, j’ai vécu ma formation un peu comme un escalier. Le second stage ENSPS m’a permis de décrocher mon stage de fin d’étude dans un établissement prestigieux. Ces deux stages ont facilité mon affectation en milieu hospitalier pour mon service militaire, puis ma thèse chez Siemens. Chaque étape a préparé et facilité la suivante. L’ensemble –diplôme ENSPS compris- a été déterminant pour décrocher mon premier emploi.
Je suis satisfait de l’expérience. Elle m’a permis de développer une compétence dans un secteur bien précis : l’imagerie médicale -enfin un domaine ou je pouvais prétendre m’y connaître un peu- tout en me faisant découvrir que je n’aurais probablement fait qu’un chercheur passable.
Comme je l’ai mentionné, le processus a été très cohérent, chaque étape renforçant la précédente et facilitant la suivante. Mon CV était donc cohérent et me préparait bien à décrocher un job dans le secteur médical, dans l’imagerie notamment. En revanche, entre 89 –date de mon diplôme – et fin 93 –obtention de mon doctorat- le contexte économique avait beaucoup changé et l’industrie médicale dégraissait. Malgré cela j’ai pu choisir entre un poste d’ingénieur bio en milieu hospitalier et un contrat de six mois d’administrateur scientifique à la Commission Européenne.
Après ma thèse, Siemens-Allemagne étant en plein dégraissage et n’étant pas en mesure de m’offrir un poste, j’ai envoyé des candidatures spontanées auprès des grandes boîtes d’imagerie médicales implantées en France, et également à peu près à toutes les entreprises du secteur des technologies médicales de Bavière. J’ai pris des contacts avec les milieux académiques pour voir s’il y avait des possibilités type INSERM/CNRS. Ayant fait ma thèse dans l’industrie, j’avais trop peu de publications pour décrocher quelque chose de cet ordre. Ayant fait ma thèse physiquement loin de la Fac, je n’avais pas pu faire d’heures d’enseignement/monitorat, donc pas de perspectives de décrocher in poste de maître-assistant à l’université. L’industrie n’embauchait pas. Restaient les carrières d’ingénieur bio en milieu hospitalier. J’ai répondu à un appel à candidature pour un poste commun à six hôpitaux du Morbihan. Mon dossier a été sélectionné pour un entretien, à l’issue duquel on m’a fait savoir que le poste était pour moi si je le voulais, mais j’ai préféré passer un an à la Commission Européenne, à assurer le suivi du portefeuille de projets Technologies Médicales, des collaborations entre équipes européennes financées par l’UE, en me disant que c’était un plat qui ne repasserait pas.
Après un an à la Commission Européenne, j’ai été recruté par Siemens France, à la Division Médicale, à Paris. J’y ai travaillé pendant 2 ans ½, à installer, dépanner (sur place, par télédiagnostic, ou par téléphone) des installations d’IRM en milieu hospitalier, et à former les utilisateurs. Une expérience assez difficile, surtout au début, car je n’étais pas doué pour ça. Le métier est rentré petit à petit mais je n’ai jamais été vraiment à l’aise face à une machine en panne et à la pression des clients. Beaucoup de collègues étaient stimulés par ce genre de défi. Moi j’avais surtout la frousse de me prendre une décharge. Pendant ce temps, j’ai passé et réussi des concours de la fonction publique Européenne, et suis retourné à la Commission depuis 1997, à la Direction Générale [=~ministère] de la Recherche, d’abord comme agent temporaire puis comme fonctionnaire. Je suis resté à l’administration de la recherche communautaire dans le domaine des sciences de la vie, d’abord chargé du suivi de projets de transfert de technologie (des projets dits de « démonstration »), puis du secrétariat du Comité de représentants des Etats Membres (le « comité de programme »), dont le feu vert est nécessaire pour toute décision importante de financement, tout en prenant également la responsabilité des règles d’évaluation des propositions de projets pour notre Programme.
Après 5 ans je suis devenu l’assistant du Directeur de la Recherche pour la Santé. La fonction d’assistant correspond à la fois à celle d’intendant, de responsable du personnel pour la Direction (140 personnes dont une soixantaine d’administrateurs scientifiques, anciens chercheurs pour la plupart), de suivi de toutes les demandes (briefings, discours, statistiques, projets de réponses aux courriers) émanant de la hiérarchie (Commissaire ou son cabinet, Directeur général), de conseil au Directeur et parfois de porte-parole. Un aide de camp en quelque sorte, ou un « bras droit ».
Comme le directeur était nouveau dans la maison, il devait s’appuyer constamment sur ses collaborateurs pour faire tourner la machinerie. Le budget géré par la Direction était d’environ 2.5 Milliards d’€ sur 4 ans. Dans la fonction d’assistant, on peut influencer mais on ne décide rien officiellement – et on porte donc assez peu de responsabilité directe. Le travail exige en revanche de très bien connaître la maison, ce qu’on peut y faire et jusqu’où on peut aller.
Quel est ton poste actuel ?
Depuis 2006, je suis Policy Officer toujours dans le même service de Recherche médicale. Je coordonne la planification, les rapports annuels d’activité, l’évaluation d’impact, les réponses aux consultations interservices et aux questions parlementaires. je supervise aussi les questions de ressources pour le service, qui fait maintenant 160 personnes, et beaucoup de demandes au pied levé de briefings, courriers ou préparations d’argumentaires ou de mémos sur les actions et la stratégie de la Direction Santé.
A quoi ressemble ta journée type ?
Travail de bureau, 4 ou 5 réunions par semaine. Beaucoup de lecture et beaucoup de production écrite. Un environnement sympa et un bon esprit d’équipe. Un milieu très multiculturel, de plus en plus anglophone -le français y recule beaucoup depuis les élargissements aux pays de l’Est.
Qu’est ce qui te plait le plus dans ton emploi actuel ?
La dimension multiculturelle, la coordination d’équipe. Le fait d’écrire beaucoup. Et constater que les initiatives de la direction, les grands projets lancés, font vraiment bouger les choses à l’échelle européenne ou mondiale.
Qu’est ce qui te rend le plus fier dans ta carrière jusqu’à présent ?
Réussir le concours général d’administrateur pour les institutions européennes. C’était très sélectif et se préparer c’est un peu faire Sciences Po par les cours du soir.
As-tu fais l’expérience d’un gros échec ? Peux-tu nous raconter? Qu’est-ce que cette expérience t’a apporté par la suite ?
La disparition des technologies médicales des priorités de recherche. Ca m’a forcé à me recycler, à ajouter plein de cordes à mon arc.
Avais-tu des activités extrascolaires qui ont contribué à ta carrière. Si oui comment ?
Activité syndicale bénévole – qui m’a plutôt scotché que favorisé dans l’évolution de carrière, même si je suis incollable sur les questions de ressources et les dossiers statutaires.
Souhaites-tu partager une expérience particulière de ta carrière ?
Avant de démarrer la thèse, j’ai effectué mon Service national dans le service Radiodiagnostic de l’Hôpital du Val-de-Grâce à Paris. J’ai travaillé sur un projet de développement d’un système de simulation/préparation d’opérations de neurochirurgie à partir d’image IRM 3D. Un projet pour lequel je voyais les résultats de nos travaux directement mis en oeuvre après quelques jours sur le cerveau des patients dans la salle d’opération voisine. C’était terrifiant : nous n’avions pas le droit à l’erreur. Une faute dans la programmation et on risquait de rendre plein de patients hémiplégiques. J’ai vite dû faire fabriquer un dispositif de validation qui m’a soulagé la conscience : ça marchait ! On allait bien prélever les échantillons suspectés d’être cancéreux dans les tumeurs, et pas n’importe où ailleurs, donc pas de risque de se rendre responsable d’hémorragies catastrophiques.
As-tu un ou des conseils à donner aux élèves ingénieurs ?
Profiter des stages. C’est le moment où on apprend vraiment, sur le tas. Ne pas s’angoisser si on n’a pas l’impression de maîtriser à 100% tout le bagage qu’on est censé porter : ça viendra avec la pratique.
Merci Olivier !
Laisser un commentaire